Pierre-Guillaume CLOS

Mind The Lanscape

(2011, résine polyester, système électronique)

De façon imperceptible, Pierre-Guillaume Clos déplace des montagnes. Rien ne lui serait donc impossible : à partir d’une simple esquisse représentant quelques vagues masses noires, il élabore un protocole de production qui ne laisse rien au hasard. Surgissent enfin des formes savamment matérialisées et agrémentées d’une petite technologie sophistiquée. « Composées d’un stratifié composite, tissu de verre et résine époxy sur une âme en polystyrène, supporté par un châssis métallique mobile motorisé », les montagnes aux reflets brillants, posées au sol, se meuvent subtilement. « Mind the Landscape (Attention au paysage) [1] », prévient le titre ; l’injonction, qui évoque ironiquement l’expression mind the gap — le trou, le décalage —, convoque plus frontalement la question du paysage et de l’attention qu’on lui porte. Le trouble perceptif provoqué par la lenteur silencieuse et énigmatique des rochers glisse vers un mode contemplatif que la technologie ne saurait troubler. Réel ou virtuel, numérique ou naturel, le paysage offert demeure un artifice du regard, à l’instar des paysages de jardins japonais où la miniaturisation, le point de fuite et le plan horizontal, la multiplicité et la symbolique élémentaire de la nature révèlent un rapport mystifié au temps et à l’espace. En oscillant subrepticement du minimalisme aux technologies numériques, Mind the Landscape provoque un rapport décalé au monde environnant où les cinq montagnes, comme les cinq doigts de la main, asymétriques et mobiles, réinventent avec poésie la scrupuleuse pratique nippone de « l’art de disposer les pierres ».

Mai Tran.

Paru dans un tiré à part de la Revue 303, octobre 2011.